Absurdité mathématique : ça, c’est fun ! Il y a forcément une erreur, mais où ? C’est un jeu amusant auquel on peut participer pour améliorer notre réflexion. C’est comme les paradoxes mathématiques !
Démontrer que 1 = 2 (en fin de collège) : absurdité mathématique
C’est sans doute l’une des façons les plus célèbres, mais il faut tout de même en parler.
La “preuve” de l’absurdité mathématique
Considérons deux nombres quelconques non nuls, que nous allons noter a et b. S’ils sont égaux, on peut écrire : $$a = b.$$ Et donc, en multipliant les deux nombres par a, on obtient l’égalité : $$a \times a = a \times b,$$ que l’on peut aussi écrire : $$a^2 = ab.$$
Maintenant, enlevons \(b^2\) à droite et à gauche du signe “=” :$$a^2 – b^2 = ab -b^2,$$que l’on peut aussi écrire sous la forme factorisée :$$(a-b)(a+b) = b(a-b).$$
Maintenant, divisons par a – b les deux nombres à droite et à gauche du signe “=” :$$\frac{\pmb{(a-b)}(a+b)}{\pmb{a-b}} = \frac{b\pmb{(a-b)}}{\pmb{a-b}},$$qui se simplifie ainsi :$$ a+b=b.$$
Comme a = b, on peut remplacer b par a dans cette dernière égalité, et on obtient :$$a+a = a, $$c’est-à-dire :$$2a = a. $$
En divisant par a à droite et à gauche du signe “=”, on obtient :$$ 2 = 1. $$
L’explication de la preuve
Si ce à quoi on aboutit est faux, c’est que nous avons fait une erreur dans la preuve. Et ici, il y a une erreur en effet…
Elle se trouve lorsque l’on divise par a – b; en effet, nous avons supposé que a = b et donc a – b = 0. Or, diviser par 0 est impossible. Donc quand nous divisons par a – b, nous faisons une erreur mathématique et par conséquent, la preuve n’est plus valable.
Épilogue
Rien de bien passionnant à ce niveau là, mais cela a le mérite de montrer aux jeunes gens qu’il faut toujours faire attention quand on rédige une démonstration. Il est facile de faire une telle erreur et la plupart du temps, on ne s’en aperçoit même pas dans la mesure où le résultat obtenu peut être cohérent.
Démontrer que 1 = 3 (en fin de Lycée) : absurdité mathématique
Ici, nous avons besoin de savoir ce que sont les nombres complexes.
La preuve
Prérequis
Avant tout, un petit rappel :
\[ \begin{cases}\forall\ a>0,\ \forall\ x\in\mathbb{R}, & a^x = \text{e}^{x\ln(a)}\\ \forall\ y\in\mathbb{R}^*, & y^0 = 1 \end{cases} \]
Le raisonnement
D’après les prérequis, on peut écrire :
\[ 1^{\frac{1}{3}}=\text{e}^{\frac{1}{3}\ln(1)}=\left(\text{e}^{\frac{1}{3}}\right)^{\ln(1)}=\left(\text{e}^{\frac{1}{3}}\right)^{0}=1.\tag{1} \]
Or, pour tout \(k\in\mathbb{Z}\) :
\[ 1=\text{e}^{2k\text{i}\pi} \]
donc :
\[ 1^{\frac{1}{3}}=\big(\text{e}^{2k\text{i}\pi}\big)^{\frac{1}{3}}=\text{e}^{\frac{2k\text{i}\pi}{3}}.\tag{2} \]
Ainsi, des égalités (1) et (2), par transitivité, on en déduit que :
\[ \text{e}^{\frac{2k\text{i}\pi}{3}}=1. \]
On en déduit alors que :
\[ \cos\left(\frac{2k\pi}{3}\right)+\text{i}\sin\left(\frac{2k\pi}{3}\right)=1 \]
et donc que :
\[ \begin{cases} \cos\left(\frac{2k\pi}{3}\right)=1\\[1em]\sin\left(\frac{2k\pi}{3}\right)=0\end{cases}\]
ou encore :
\[ \frac{2k\pi}{3}= 2k\pi \]
d’où, en simplifiant par \(2k\pi\), \(k\neq0\) :
\[ \frac{1}{3}=1 \]
soit finalement :
\[ 1=3. \]
Où est l’erreur ?
Première chose : la formule vue au collège sur les exposants :
\[ x^{pq} = \left(x^p\right)^q,\ p\in\mathbb{Z},\ q\in\mathbb{Z} \]
est aussi vraie si les exposants sont réels.
En effet, on a (pour \( x > 0\)) d’une part :
\[ x^{ab} = \text{e}^{ab\ln(x)},\]
d’autre part :
\[ \left(x^a\right)^b=\left(\text{e}^{a\ln(x)}\right)^b = \text{e}^{b\text{e}^{\ln\left(a\ln(x)\right)}}= \text{e}^{b \times a\ln(x)}=\text{e}^{ab\ln (x)}. \]
On obtient bien les deux mêmes expressions.
De plus, l’égalité (2) est vraie aussi. Il faut juste avoir à l’esprit qu’elle est vraie pour tout k entier.
Alors, où est le bug ? Et bien, il est dans le fait de considérer l’égalité (1) dans le corps des réels.
En effet, l’égalité (1) est traitée dans le corps des réels alors que l’égalité (2) est traitée dans le corps des complexes. On ne peut pas tenir un raisonnement en passant d’un corps à l’autre. C’est le même problème quand on dit que 1 + 1 = 0… mais dans l’anneau \(\mathbb{Z}/2\mathbb{Z}\). Quand on raisonne, il faut toujours se fixer un “lieu”… et ici, on prend le corps des nombres complexes (de toute évidence).
L’égalité (1) nous dit que seule “1” est une racine cubique de “1” : c’est vrai dans \(\mathbb{R}\) mais pas dans \(\mathbb{C}\).
Le raisonnement ne tient donc pas dès cette égalité.
Épilogue
N’oubliez pas que ce qui est tentant n’est pas toujours bon… (et c’est aussi valable pour le Nutella…)
Si cet article vous a plus, vous aimeriez peut-être cette page sur les différents raisonnements mathématiques.
Bonjour Monsieur Pasquet,
L’année passée, j’ai testé une séquence avec mes élèves du collège sur les différents types de raisonnement mathématique. Elle démarrait avec votre vidéo sur YouTube.
J’aurais souhaité reconduire cette séquence avec la même introduction, mais à mon grand dam, je me suis aperçue qu’elle n’était plus disponible (ni sur YouTube, ni sur votre site).
Serait-il possible d’y accéder d’une façon ou d’une autre ?
D’avance merci pour votre réponse. Et merci aussi pour ce que vous proposez sur votre site.
Bien à vous,
Patricia Dard
Bonjour. Cette vidéo n’est plus en ma possession. Ce n’est pas volontaire, mais en supprimant la chaîne Youtube, j’ai dû oublier de la sauvegarder, et je n’ai plus les rushs originaux.
Par conséquent, cette vidéo n’existe plus… D’ailleurs, c’est en effet dommage car ce n’était pas la pire 🙂 Peut-être trouverez-vous une vidéo mieux faite ailleurs…